
La nature de mon handicap (?), de ma déficience (?), de ma pathologie – la Neuropathie Optique Héréditaire de Leber – nécessite de présenter rapidement l’étymologie du vocabulaire spécifique à la « déficience visuelle ». Le mot « aveugle » serait issu de l’évolution de l’expression latine « ab oculis » (sans yeux, privé d’yeux). Quant au terme « cécité », il viendrait du mot latin « caecitas » (perte de la vue, aveuglement), lui-même formé sur « caecus » (aveugle).

On relève, d’emblée le caractère négatif et l’idée d’absence, de défaut, de manque. L’aveugle serait alors celui qui a perdu complètement la vue, qui serait dans les ténèbres absolues comme l’est celui qui est énucléé.

Il est également pertinent de souligner la connotation péjorative de ces mots dans leur sens dérivé ou figuré. Par exemple, on qualifie d’aveugle une personne dont le jugement est troublé, qui manque de raison, de discernement.
Sans anticiper sur les analyses qui suivront, il n’est pas inutile, ici, de rappeler que Pierre Villey parle de « préjugé de la cécité ». Il estime que « plus que par son infirmité, la condition sociale de l’aveugle a été façonnée par l’idée fausse que les voyants se sont faite de cette infirmité.[1] […] Le clairvoyant juge les aveugles non par ce qu’ils sont mais par la crainte que la cécité lui inspire.[2] »

[1] Pierre Villey, « L’aveugle dans le monde des voyants – Essai de sociologie », Flammarion, 1927, p. 6
[2] Pierre Villey, « Le Monde des aveugles – Essai de psychologie », 1914, réédition GIAA Librairie José Corti, 1984, p. 3
